Les châteaux forts (supplément au Mots Croisés d’Archéo #8)

Le mot château vient du latin castellum[i]. Le terme « château fort » apparaît en 1835, à l’occasion de la résurgence romantique de l’imaginaire médiéval. Il disparaît pratiquement durant le xvie, xviie et xviiie siècles. Il revient en force à travers notamment la littérature au xixe siècle : Walter Scott, Victor Hugo, Gérard de Nerval, Verlaine, Rimbaud, Huysmans.

Le château fort est multiple : forteresse et résidence du seigneur, centre politique d’une domination territoriale, et enfin centre de l’exploitation seigneuriale

Évolution des châteaux forts

X – XIe siècle

L’enceinte castrale est la première forme de notre château fort. Cette fortification occupe généralement un terrain plat sur un promontoire. L’enceinte se compose d’une palissade souvent accompagnée d’un fossé[1]. Elle protège quelques bâtiments. Ce type d’aménagement a cohabité avec les mottes castrales.

Ces mottes sont faites de terres et de bois. Dans l’Europe du Nord, on bâtit une motte de terre qui permet de surélever la construction. On y plante une palissade tout autour de la motte. À son sommet se trouve un fortin de bois, tour carré, aménagé avec une tour de guet en charpente analogue à un donjon[2]. Dans les régions méditerranéennes, on construit plus souvent une tour de pierre sur un pic rocheux. Au pied de la butte, une autre palissade encercle et protège les bâtiments d’usage et de logements, c’est la basse-cour.

Ces constructions militaires se multiplient dès la moitié du XIe siècle, d’abord dans les régions frontalières très exposées. La violence ambiante incite tous ceux qui en ont les moyens à fortifier leur château. Le choix du matériau ne dépendant que des moyens du commanditaire, les châteaux en pierre coexistent avec les châteaux en bois. Les fortifications en pierre, encore rare au Xe siècle, correspond souvent à une construction romaine plus ou moins modifiée

Le château n’est plus seulement un enjeu militaire, il est aussi un lieu d’habitation pour une population de plus en plus nombreuse.

Motte féodale,Plougras (Bretagne)

XIIe siècle

Cette période est celle de l’apogée du château fort :

  • Les murailles deviennent plus hautes et plus épaisses.
  • La courtine[3] se flanque de tours, d’abord carrées avant de devenir rondes. Ce changement permet une défense optimale des archers en supprimant les angles morts.
  • Le donjon devient circulaire pour améliorer la défense.
  • Apparition des meurtrières[4] pour faciliter le tir à l’arbalète.
  • Utilisation accrue de la pierre, mais utilisation du bois pour les défenses annexes (barbacanes[5], hourds[6]).

Le donjon devient le refuge ultime en cas d’attaque. Il est délaissé en tant que résidence. Un corps de logis y est accolé pour plus de confort.

Château du Louvre

XIIIe siècle

Les châteaux forts se dotent de quelques nouveautés :

  • Apparition de la double enceinte.
  • Construction de tourelles pour atténuer les derniers angles morts.
  • Aménagement d’un chemin de ronde et d’un fossé plus large et plus profond.

XV-XVIe siècle

Le progrès effectué en matière d’artillerie (utilisation de boulets en fer) rend les murailles vulnérables. Le château fort s’adapte tout au long des xve et xvie siècles :

  • Installation de plateforme avec canon au sommet des tours.
  • Construction de barbacanes en U.
  • Élargissement des fossés.
  • Multiplication des tours le long de la courtine.

À cette époque, on continue d’utiliser les châteaux, mais on n’en construit plus de nouveau. D’ailleurs Henri IV ordonne la destruction ou le démantèlement de nombreuse forteresse pour éviter qu’elles servent de repaire aux ennemis de l’autorité royale.

Petit à petit, la fonction résidentielle des châteaux est privilégiée. Les ponts-levis sont remplacés par des ponts fixes en pierre. Les bâtiments situés dans la cour sont percés de fenêtres à meneaux. Parfois de nouveaux bâtiments sont construits ou d’autres, simplement remaniés.

Evolution du château fort

La configuration des châteaux forts


[1] Fosse creusée en long pour délimiter des parcelles de terrain, pour faciliter l’écoulement des eaux, ou pour servir de défense

[2] Tour maîtresse d’un château fort, qui était la demeure du seigneur et le dernier retranchement de la garnison.

[3] Mur joignant les flancs de deux bâtiments voisins.

[4] Ouverture étroite aménagée dans les murs et les portes d’un ouvrage fortifié pour lancer des projectiles.

[5] Ouverture verticale étroite qui donne de l’air et du jour à un local. Au Moyen Âge, ouvrage généralement semi-circulaire couvrant une porte de place.

[6] Au Moyen Âge, galerie en charpente établie en encorbellement au sommet d’une muraille pour en battre le pied. (Il a été remplacé plus tard par le mâchicoulis permanent.)


[i] Le mot latin castellum (au pluriel castella), diminutif de castrum désigne dans l’antiquité romaine deux types de construction :

  • le castellum militaire est un fortin, généralement intégré dans le système de fortification du limes. Au Moyen Âge, c’est le château central du castrum, village plus ou moins fortifié sur une hauteur, notamment en Languedoc ;
  • le castellum divisorium est un ouvrage (château d’eau) qui recevait l’eau en provenance de l’aqueduc romain et qui la répartissait entre les différentes conduites de distribution. La ville de Nîmes (Nemausus) conserve les vestiges de son castellum divisorium.

Le mot latin castellum est l’origine des mots français « castel », « chastel », puis « château ».



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